Dans sa chronique « le monde sous la Loupe » dans Métro, le journaliste Antoine Char lance une alerte sur les « Pertes de mémoire en Syrie », la destruction des sites archéologiques, le pillage du pays qui se vide, à l’instar de l’Irak voisin quelques années auparavant, de ses trésors millénaires.
« Œuvres d’art remontant aux Babyloniens et aux Phéniciens, puis aux Grecs, aux Romains et aux Byzantins, en passant par les Perses, les Arabes et les Turcs, châteaux et forteresses du temps des Croisades, mosquées et églises datant du Moyen-Âge : la liste du carnage culturel est longue. Des milliers de manuscrits et d’antiquités se retrouvent tous les jours sur le marché noir. Des mosaïques sont arrachées au marteau-piqueur. Les rebelles monnaient le tout pour s’acheter des armes. L’armée syrienne, elle, a transformé certains sites archéologiques en camps militaires.
C’est le grand vol à l’étalage de toute l’histoire de la Syrie, pays plusieurs fois millénaire. Les objets dérobés sont vendus aux enchères à Londres, New York et Paris chez Christie, Sotheby et Drouot, même si la Cour pénale internationale (CPI) qualifie le vol des trésors de l’humanité de «crime de guerre» passible de poursuites.
Comme il y a 10 ans en Irak quand le plus vieil État du monde a été dépossédé d’une bonne partie de ses biens archéologiques et artistiques sous le regard impassible des soldats américains, l’UNESCO tire la sonnette d’alarme. Mais ce sont des cris dans le désert. En juin, l’organisation onusienne a encore inscrit sur sa liste du patrimoine mondial en péril six sites historiques syriens menacés par les combats. La plupart d’entre eux sont des lieux stratégiques dans la guerre à finir que se livrent les deux parties.
À Alep, par exemple, le minaret de la mosquée des Omeyyades construite au VIIIe siècle s’est effondré. Il offrait militairement une vue imprenable sur la ville – une des plus vieilles du monde – qui a également perdu une grande partie de ses souks centenaires. ».