Le Musée national, théâtre d’un soir

Valérie Cachard. Photo DR

Une scène prestigieuse, une première théâtrale, novatrice, peut-être même instauratrice d’une série d’événements contemporains, de performances, d’un renouveau culturel qui s’annonce depuis quelques années, au sein de cette belle institution, le Musée national de Beyrouth.

Valérie Cachard est l’instigatrice du projet, avec le soutien inconditionnel de la conservatrice du Musée, Anne-Marie Afeiche et Georgia Makhlouf, écrivaine et critique littéraire, initiatrice des ateliers d’écriture. Le rendez-vous est donné ce soir, samedi 19 septembre pour une lecture en déambulation et en musique, à 17 – 18 et 19 heures.

Cet événement est également l’occasion du lancement du livre Les voix,  édité par Kitabat. L’ouvrage reprend les textes écrits par treize auteurs (Randa Aractingi, Valérie Cachard, Hayat Chaker, Gabriel Deek, Leyla el-Fadl, Maria Fiani, Marie-Noelle Japy, Béatrice Khater, Joelle Kosremelli, Mona Krayem, Marie Laguarrigue, Nadine Mokdessi et Liliane Sweydane) qui y ont participé aux ateliers. Il est illustré par des gravures originales de Hassan Zahreddine, inspirées par les mêmes objets qui ont servi de support aux écrits ».

Dans un entretien accordé à l’OLJ, Valérie Cachard revient sur la genèse de ce projet: « En novembre 2011, j’ai assisté au Louvre à un travail théâtral en hommage à Le Clézio, et dans ma pratique théâtrale, j’aime investir des lieux qui ne sont pas des scènes de théâtre à proprement parler, mais plutôt des lieux publics ou privés qui créent une interaction autre avec les gens. Lors de nos répétitions pour la lecture par exemple, les visiteurs s’arrêtaient spontanément, venaient écouter une bribe, posaient des questions. Ce sont des moments qui donnent envie de se rassembler, de s’asseoir, de partager. C’est ce qui a porté et motivé l’ensemble des participants à ce projet…

Je fais partie des auteurs qui ont suivi les deux ateliers d’écriture. Suite aux visites organisées avec Anne-Marie Afeiche, Georgia Makhlouf nous a fait des propositions d’écriture répondant à des genres différents (épitaphe, poésie, monologue théâtral, contes…). À la lecture de tous nos textes, elle a perçu qu’il y avait là matière à une composition commune, à la création d’un ensemble ; il y avait à trouver comme un chemin entre ces langues. Chacun des auteurs m’a alors communiqué un ou plusieurs de ses textes. Je les ai mélangés, parfois coupés, et j’ai mis en relief des phrases particulières, sans réécrire les originaux. J’ai emprunté au théâtre sa structure et j’ai mis nos mots dans la bouche de personnages : gardiens, statues, visiteuses, etc. J’ai imaginé une lecture qui se ferait en déambulation, qui commencerait au pied des grands escaliers extérieurs et qui se terminerait dans le sous-sol. Le texte est divisé en conversations qui fonctionnent un peu comme des tableaux ».

Le foisonnement culturel au Liban, malgré la situation politique et économique particulières, nous laisse admiratifs. Toutes ces initiatives, portées par des jeunes, qui pour un moment ont quitté le pays pour les études, sont rentrées avec des bagages remplis de nouvelles idées, piochées lors de leurs parcours. Admiratifs aussi, pour le soutien intergénérationnel, des conservateurs, écrivains, poètes, illustrateurs, à l’écoute, attentifs aux renouvellements qui s’effectuent dans le milieu des arts, désormais en communion créative.

Depuis quelques années maintenant, nous observons la mutation du Musée national, en « musée vivant ». Cette institution qui a défié la guerre, grâce à la foi et l’ingéniosité de l’émir Maurice Chéhab, se voit métamorphosée grâce à l’audace de sa conservatrice. Toujours dans le respect des lieux, Anne-Marie Afeiche a su insuffler un esprit de jeunesse et dépoussiérer les pratiques. En miroir des programmations européennes, elle a instauré la nuit des musées, des spectacles, concerts et conférences, des parcours de visites adaptés aux enfants, etc.

Les paroles nous manquent parfois pour exprimer notre gratitude à toutes les personnes qui œuvrent pour le rayonnement culturel de notre pays. Alors que les budgets alloués au ministère de la culture se réduisent à une « peau de chagrin », le travail effectué en amont et en toute discrétion pour faire appel aux mécènes privés reste le nerf vital et indispensable pour la concrétisation des projets.

Merci à chacune des personnes citées plus haut, de croire et faire vivre ces lieux magiques, notre patrimoine à tous, riche et universel. Merci aussi pour toutes les personnes qui travaillent dans l’ombre, les petites mains, sans elles la lumière aurait manqué à tout projet.


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